Douglas Adams, sciences et nouvelles technologies

“Il y a une chose dont je suis particulièrement fier. Je suis né en 1952 à Cambridge et mes initiales sont DNA” aimait à répéter Douglas. Comment s’étonner que cet auteur, né à l’endroit et l’année même où a été découverte l’ADN (DNA en anglais) soit un passionné de science et de nouvelles technologies.

 Douglas Adams croyait aux apports bénéfiques des progrès scientifiques et technologiques. "Ce qui est nouveau nous fait peur car nous prenons toujours comme étalon ce que nous avons connu dans notre jeunesse", résumait Douglas avec une pointe d’ironie.

 Pour lui, le monde s’explique par la raison. Les découvertes scientifiques en biologie, en physique et en astronomie lui ont donné une explication raisonnée au fonctionnement et à l’origine du monde. Il est adepte du néo-darwinisme, représenté par Richard Dawkins, qui a été l’un de ses grands amis. "Le darwinisme est basé sur une tautologie (1) : celui qui survit, survit… C’est une tautologie unique car elle ne requiert aucune justification, alors qu’elle fournit un nombre incalculable d’explications. Je pense que c’est donc, de toute évidence, la cause première de tout ce qui existe dans l’univers".

 Douglas Adams a toujours été très apprécié dans les communautés scientifiques et informatiques. Celles-ci sont bien placées pour estimer à sa juste valeur l’univers complexe et l’imagination tordue de Douglas. Du générateur d’improbabilité à la Terre conçue comme un gigantesque ordinateur pour trouver la question à l’ultime réponse,…

 Ils apprécient même la dérision faite par Douglas Adams de leurs propres ambitions : "Les scientifiques ont toujours rêvé d’une théorie simple et synthétique pour expliquer l’univers. Aussi le guide galactique et sa blague autour de 42 ont toujours été extrêmement populaires dans ce milieu " témoigne MJ Simpson, auteur de "the utterly unauthorized guide to hitchhiker’s guide".

 Au milieu des années 90, on imagine la surprise des scientifiques de l’université de Cambridge qui s’évertuaient à calculer l’âge de l’univers et sont tombés sur le chiffre… 42. "Ca a été la cause de grandes rigolades quand on est arrivé à 42, car nous sommes tous de grands fans du guide galactique" commentait Keith Grange, l’un des responsables de l’équipe scientifique.

 En 1998, des astronomes ont décidé de baptiser un astéroïde du nom d’un des personnages centraux du guide, Arthur Dent (Arthur Accroc dans la version française).

 "J’ai toujours pensé qu’il fallait être scientifique pour apprécier pleinement les livres de Douglas Adams", explique Richard Dawkins.

 La communauté informatique pour sa part lui rend souvent hommage par des références appuyées tant sur Internet (le Babelfish a été récupéré par Altavista tandis que les versions officieuses du guide se comptent par centaines) que dans le milieu des logiciels (un programme s’appelle Trillian) ou les jeux vidéos (dans "Fallout 2" par exemple). Autres exemples célèbres : le drapeau de Microsoft compte 42 carrés, le format d’image TIFF est basé sur le chiffre 42, et si vous entrez "the answer to life, the universe and everything" dans goole.com, il vous donnera la réponse… 42.

 Depuis les années 80, Douglas a souvent été l’invité d’honneur de nombreux rassemblements scientifiques et technologiques, et y a prononcé quelques discours forts remarqués (comme son intervention marathon prononcée au Digital Biota 2 à Cambridge en septembre 1998 intitulé "Y a t-il un Dieu artificiel?" et qui a été incorporée dans son livre posthume "le saumon du doute" publié en France en 2003 chez Folio SF sous le titre « Fonds de Tiroir »).

 Cet amour de la science l’a porté à s’intéresser aux nouvelles technologies. Soit, Douglas ne fait pas dans le fétichisme. Il s’est largement moqué de celui qui porta une génération entière à fantasmer sur les montres à cristaux liquides. Mais il est clair que notre homme aimait être à la pointe de la technologie dans le domaine informatique. Il a été parmi les premiers utilisateurs d’Internet, il a acheté les ordinateurs des toutes premières générations jusqu’à ce qu’il tombe sur Apple dont il restera jusqu’à sa mort l’un des plus fervents adeptes. La firme californienne lui attribuera d’ailleurs le titre honorifique d’Apple Master. Quelques mois avant de mourir, il comptait dans son bureau deux ordinateurs G4 avec écrans géants, un ordinateur portable powerbook, trois imac, et un vieux G3!

 Certes, son utilisation des ordinateurs peut laisser rêveur : "j’ai passé une heure très agréable à écrire un programme sur mon ordinateur. Il me dira instantanément le volume des nids de mégapodes. C’est un programme très bien fait, sexy, avec toutes sortes de menus en pop-ups et autres choses du genre. L’avantage de ce programme est que la prochaine fois que j’ai besoin de connaître exactement le volume d’un nids de mégapode, il me suffira d’entrer ses dimensions générales et l’ordinateur me donnera son volume en moins d’une seconde. C’est un gain de temps inestimable. L’inconvénient, c’est que je ne peux imaginer une autre occasion où j’aurais besoin de connaître le volume d’un nids de mégapode, mais qu’importe…" (Last chance to see, p.37)

 Reflétant ces préoccupations et intérêts, Douglas a réalisé une série de quatre émissions intitulée "The hitch-hiker’s guide to the future" (le guide de l’auto-stoppeur du futur) pour Radio 4. Il s’y pose plusieurs questions : le livre électronique entraînera-t-il la disparition des livres traditionnels? Les formats mp3 et midi apportent-ils quelque chose de nouveau à la musique? La télévision et le cinéma interactifs vont-ils permettre à chacun de devenir programmateur voire cinéaste? Est-ce que l’homme peut-il être dépassé par la technologie poussée à l’extrême? Pour apporter le maximum d’éléments à l’auditeur, Douglas n’hésite pas aller interviewer des personnalités aussi différentes que le musicien Peter Gabriel et un chercheur spécialisé en nanotechnologies.

 (1) Proposition complexe qui reste vraie en vertu de sa forme seule, quelque soit la valeur de vérité des propositions qui la composent. (Le Petit Robert)

A LIRE :

 > "The Science of The Hitchhiker’s guide to the galaxy" par Michael Hanlon (MacMillanScience, 2005) – Un excellent ouvrage qui fait le point sur les concepts scientifiques abordés par Douglas dans H2G2.

 > "Is there an artificial god?". Le discours de Douglas Adams au Digital Biota 2.
Septembre 1998. Le texte de cette conférence a été publiée dans le livre posthume de Douglas "Salmon of Doubt". On peut donc le retrouver en Français dans la traduction de Salmon : "Fonds de tiroir" chez Folio SF.

 > Témoignage et hommage de Richard Dawkins. En anglais bien sûr.

LIENS :

 > Le Guide du Futur.